Antoine Bruhier

fl. circa 1500-1521

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Biography

Dans une requête du 3.10.1513 à la curie pontificale, Antoine Bruhier se déclare clerc du diocèse de Noyon et fils naturel d’un prêtre et d'une femme seule (R. Sherr dans Grove online, cité par Wexler 2014, p. 21, d'après V-CVaav, RS 1425, f. 24v-25). Un document du 1.11.1519 (Frey 1955-1956, (8) p. 61-62, date rectifiée de 1517 à 1519 par Sherr, Grove Online) dispense Bruhier de la maîtrise de la langue parlée "à Genève au diocèse de Lyon" pour être pourvu d'un bénéfice dans cette ville. Ce document inexplicable ne suffit pas à remettre en cause les nombreux éléments qui indiquent que Bruhier était bien francophone.

Premières œuvres en circulation c. 1500
La plus ancienne trace de l'activité de Bruhier est l'inclusion de sa chanson Vray dieu qui me confortera dans un chansonnier réalisé vers 1500 pour Philibert II le Beau, duc de Savoie, dont sa veuve, Marguerite d’Autriche, hérita pour sa bibliothèque (B-BR, ms. 11239, attribution "Bruhier" ; Picker 1965). Sa musique circulait aussi déjà en Italie, puisque sa chanson à quatre voix La turatu paraît anonymement dans l'Odhecaton imprimé par O. Petrucci à Venise en 1501.

Cathédrale de Langres, 1503-1504
Le premier emploi connu de Bruhier est celui de psallette (maître des enfants) de la cathédrale de Langres. La série des registres capitulaires, qui présente une lacune entre mai 1502 et août 1503, ne permet pas de préciser la date de son arrivée, mais il avait pris cette fonction avant le 19.8.1503. À cette date, il est qualifié de "chantre et désormais psallette" et obtient une augmentation de gages de 20 l.t. à condition de "faire copier les messes, motets et autres choses qu'il composera dans des livres et volumes de l'église", et de bien instruire les enfants de chœur en musique et en bonnes mœurs, et d'adopter lui-même un comportement décent (Fiala PCR, d'après F-AD52, 2G10, f. 4v, inconnu de la littérature à ce jour ; voir texte intégral de cette entrée en annexe, ci-dessous). La formulation de cette entrée du 19.8.1503 indique qu'il avait d'abord été reçu comme chantre et venait d'être promu psallette. Aucun nom de nouveau chantre ni de psallette n'ayant auparavant été relevé dans la documentation après que Jean Colon a abandonné cette charge en juillet 1500, Bruhier pourrait être arrivé à tout moment entre août 1500 et juillet 1503. Le 29.9.1503, il réclame en chapitre la responsabilité administrative des enfants de chœur mais, le 6.10., les chanoines préfèrent confier cette fonction à l'un des leurs, et demandent à Bruhier d'amender ses mœurs, ce qu'ils lui font à nouveau promettre le 13.10. Le 20.10., ils lui interdisent de présenter des chantres passants en chapitre, sous peine de voir les dons alloués à ces chanteurs directement prélevés sur son salaire. Le 30.10., la gestion des enfants de chœur est confiée pour l'année à venir au chanoine Hugues Bouvot. Le 3.1.1504, le chapitre accorda à Bruhier une aide de 6 l. 14 s. 4 d.t. pour solder ses dettes, mais acta la décision de se mettre secrètement en quête d’un nouveau maître plus discipliné. Encore mentionné pour une dette de 100 s. le 29.4.1504, il obtint du chapitre l'autorisation de s'absenter le 16.8.1504, moyennant une retenue de 100 s. sur son salaire. Les chanoines avaient alors déjà tenté, le 31.7., de convaincre Loyset Compère de venir le remplacer, mais ce n'est que le 13.11. qu'ils nommèrent finalement, après avoir testé des maîtres des enfants de Dijon et Besançon, un nouveau psallette, en la personne de Jean Louard*. Au total, Bruhier servit à Langres au moins un an, de l'été 1503 à l'été 1504. Les chanoines avaient remarqué sa capacité de compositeur mais ne purent accepter sa mauvais gestion et son indiscipline (Fiala PCR, d'après F-AD52, 2G10, f. 4v, 8-11, 32, 44v-45v ; tout ceci rectifie et précise Populus 1939, p. 15-16, qui date son arrivée de 1504 au lieu de 1503 ; Lesure 1966, p. 203, puis Wexler 2014, p. 24, reposent sur cette publication).

Cours de Ferrare et Urbino
De 1505 à 1506, Bruhier travailla à Ferrare pour Sigismond d’Este et il est également apprécié par le duc Alphonse Ier qui lui fait cadeau de £ 10.17 le 17.3.1505 (I-ASMo, Archivio Estense, Camera ducale, Registro dei mandati 1505-1506, c. 35). Une lettre qu’il adresse à Hippolyte Ier d’Este et qui date de 1507 ou 1508 montre qu’à cette période il se trouvait au service de Guidobaldo I della Rovere, duc d’Urbin. Dans cette lettre, Bruhier inclut des pièces de musique (Cavicchi, Colin, Vendrix 2012, p. 337) et il dit devoir passer par Ferrare avant de rentrer en France (Lockwood 1985, p. 111 ; Lockwood 2001, p. 152-154).

Lettre avec signature autographe, 1506 ou 1507

Uune lettre manuscrite de Bruhier au cardinal Hippolyte Ier d’Este, datée d’Urbino, le 23.2.150[6 ou 7, le dernier chiffre est illisible]
(I-ASMo, Archivio per materie, Musica, busta 1/A)
dont j’ai récemment élucidé la signature en lettres démesurées : elle doit se lire « v [ost] re petit camuz servyteur Bruhier ». Cette allusion au timbre Petite camusette, alors fameux (et en outre rappelé par trois notes de musique intégrées à la signature) témoigne de la familiarité des mécènes italiens pour tout ce répertoire (Cavicchi 2012a, p. 337; Wexler 2014, p. 27-29; Fiala 2016, note 44)

Rome, chapelle privée du pape Léon X, 1513-1521
Du 4 juillet 1513 jusqu’au 11 mars 1521 au plus tôt, il sert Léon X (Pastor 1909, p. 56 ; Frey 1955, p. 61-62 ; 413-414 ; Sherr 1983, p. 13). Un document du 3.10.1513 le mentionne comme clerc du diocèse de Noyon, et lui assigne le canonicat et les prébendes de l’église de cette ville. En 1514, la chambre apostolique lui dispense le salaire très élevé de huit ducats d’or par mois, somme qui reflète l’estime dont il jouissait aussi auprès du pape (Haberl 1888, p. 68). En 1515, il écrit le motet Vivite felices (pour quatre voix) à l’occasion de la rencontre entre Léon X et le roi de France François Ier. Bruhier bénéficiait évidemment d’une situation privilégiée ; les documents concernant son service auprès du souverain pontife montrent qu’il est familiaris et commensalis parmi ses officiers les plus proches, le musicus secretus et le cantor secretus faisant partie de la chapelle privée du souverain pontife (en 1513, 1514, 1515, 1521 : Frey 1955 ; en 1517 : Haberl 1888, p. 67). Le 1er novembre 1517, alors qu’il figure encore parmi les cantori secreti, il reçoit un canonicat à Genève, qui appartenait alors au diocèse de Lyon, et c’est à partir de 1519 que Bruhier intègre le service de la chapelle papale (Sherr 1983, p. 13).

Lien à la cour de France
Ensuite, il est possible que Bruhier ait eu des contacts avec l’entourage musical de la cour du roi de France : il est effectivement mentionné dans le motet Mater floreat florescat de Pierre Moulu, composition peut-être liée à l’entrée triomphale à Paris de la reine Claude de France, épouse de François Ier le 10 mai 1517 (Lowinsky 1957, p. 88, 96 et Fallows ).

Son oeuvre et sa rénommée
Bruhier est cité parmi les chantres les plus célèbres de son temps dans les ouvrages de Teofilo Folengo (Baldus, Livre XX, Folengo 1928, II, p. 380) et François Rabelais (Quart livre, Prologue, Rabelais 1994, p. 530-531). En plus d’être mentionné dans le motet de Pierre Moulu Mater floreat florescat, son nom appararaît dans Chimer, ciner fonder got, canon drolatique à quatre voix sur un texte en langue macaronique, conservé dans le manuscrit Bologna Q19, qui est daté de 1518 (fol. 202v). Une liste établie le 15 juillet 1474, et contenant des paiements pour les chantres de la chambre ducale des Sforza de Milan, mentionne un certain « Antonio di Bruges », mais nous n’avons pas d’autres documents pour confi rmer qu’il s’agit d’Antoine Bruhier (Motta 1887, p. 322, 339 ; Matthews et Merkley 1999, p. 102, 116). De ses compositions, il reste un canon sans texte, quatre messes, quatre motets et huit chansons. Parmi les oeuvres perdues, se trouve une pièce à deux voix composée sur le Clama ne cesses de l’Agnus dei III de la messe de Josquin Desprez L’homme armé super voces musicales, un motet pour la Vierge (mais identifiable avec l’Ave celorum regina conservé dans le manuscrit Bologna Q20) ; la mise en musique des sept heures de la Passion du Christ à trois voix.

-- Annexe. Documents d'archives inédits --

1. Extraits du registre (plumitif) d'actes capitulaires de la cathédrale de Langres, F-AD52, 2G10
f. 4v. 19.8.1503
< en marge : Conclusio pro psalleta ; raturé: Nons. di. [?] psalleta>
Visa <ajout interlinéaire : per dominos> et audita requesta scripto data per Anthonium Bruyer <ajout interlinéaire : cantorem et nunc> psalletam ecclesie, concluserunt stipendia sua augmentari de somma xx l.t. eidem assignanda per modum pensionis <raturé : super ; ajout interlinéaire : annualis super fructibus> cure de Moustriello super Sagonam [Montureux-sur-Saône, voir DicoTopo] quamdiu <biffé : ecclesie servierit et> dominis placuerit, proviso quod ipse <raturé : dein> Bruyer deinceps scripto et in libris <ajout interlinéaire : ac voluminibus> decenter et honeste registrare et inscribere seu registrari et inscribi facere tenebitur missas, motetos et alia per ipsum <raturé : jam> componenda, necnon pueros chori bene et decenter in arte musicali, in bonis etiam moribus instruere ac honeste <raturé : seipsum> prout decet seipsum conducere sub pena seu emenda arbitrio dictorum taxantium, quod ita facere promisit dictus Bruyer.

Ayant vu et entendu la requête donnée par écrit par Antoine Bruyer, chantre et désormais psallette de l’église, mes seigneurs ont conclu d’augmenter ses gages de la somme de XX l.t. qui lui sera assignée à titre de pension annuelle sur les fruits de la cure de Montureux-sur-Saône [voir DicoTopo] tant qu’il plaira à mes seigneurs, en échange de quoi ledit Bruyer sera tenu de reporter et inscrire ou faire reporter et inscrire proprement et honnêtement par écrit dans des livres et volumes les messes, motets et autres choses qu’il composera, ainsi que de bien et décemment instruire les enfants de chœur dans l’art musical, et aussi en bonnes mœurs, et de lui-même se conduire honnêtement, ainsi qu’il convient, sous peine ou amende à être définie par arbitrage de mes dits seigneurs. Ainsi a promis de faire ledit Bruyer.



Cavicchi Camilla, Fiala David

Information

  • Roles

    Choirmaster
    Cleric
    Composer
    Dedicator
    Illegitimate birth
    Instrumentalist
    Member of a church (higher ecclesiastic, canon)
    Member of a court chapel (musician)
    Member of a princely/private household
    Singer
    Teacher

  • Gender

    Male

Events

(YYYY-MM-DD)

7 in database

Geographical origins

Noyon (France)

Musical source

Composer
circa 1500
Chambéry (France)


Comments: Une de ses chansons incluse dans un chansonnier réalisé vers 1500 pour Philibert II le Beau, duc de Savoie.

Musical position

Choirmaster
1503-06/1504-12
Langres (France)


Institution: Cathédrale Saint-Mammès de Langres, Langres (France)

Comments: Qualifié de "chantre et désormais psallette de l'église" ("cantorem et nunc psalletam ecclesie") le 19.8.1503, il était donc déjà présent comme chantre, depuis un temps indéterminé, et avait été nommé psallette peu avant. Par estimation, on propose de supposer qu'il était arrivé au moins depuis deux mois, en datant le début de sa présence à Langres de juin 1503. Il y servit au moins un an et demi au total.

Musical position

Composer
1505/1506
Ferrara (Italy)


Patron: Sigismondo d'Este

Institution: Corte ducale di Ferrara, Ferrara (Italy)

Musical position

Composer
circa 1507
Urbino (Italy)


Patron: Guidobaldo I della Rovere

Institution: Corte ducale d'Urbino, Urbino (Italy)

Benefice

Member of a church (higher ecclesiastic, canon)
circa 1513
Noyon (France)


Institution: Cathédrale Notre-Dame de Noyon, Noyon (France)

Musical position

Choirmaster
1513-07-04/1521-03-11
Roma (Italy)


Patron: Leo X

Comments: Dans la chapelle privée du souverain pontife avec le statut de musicus secretus et de cantor secretus.

Benefice

Member of a church (higher ecclesiastic, canon)
1517-11-01
Genève (Switzerland)

Associated works

1 in database

Variant names

Brochier ; Broier ; Broyer ; Brubyer ; Brucher ; Bruchier ; Brugier ; Bruglier ; Bruher ; Bruhiere ; Bruhyer ; Bruyer

Associated people

No associated person.

Bibliography

[Cavicchi Colin Vendrix 2012]

Cavicchi, C., Colin, M.-A. et Vendrix, P. (éd.), 2012, Antoine Bruhier, La musique en Picardie du XIVe au XVIIe siècle, Turnhout, p. 153, 377, 366‑368 http://www.sudoc.fr/167048686.
(pp. 153, 377, 366-368)

[Folengo 1928]

Folengo, T., 1928, Le Maccheronee, Bari.

[Frey 1955-1956]

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(pp. (8) p. 61-62, 413-414)

[Haberl 1887]

Haberl, F. X., 1887, Die römische ‘schola cantorum’ und die päpstlichen Kapellsänger bis zur Mitte des 16. Jahrhunderts, Vierteljahrsschrift für Musikwissenschaft, 3, p. 189‑296 http://lccn.loc.gov/68129303.

[Lockwood 1985]

Lockwood, E. E., 1985, Adrian Willaert and Cardinal Ippolito I d’Este : New Light on Willaert’s Early Career in Italy 1515–21, Early Music History, 5, p. 85‑112.

[Lockwood 2001]

Lockwood, L., 2001, Bruhier, Lupus, and Music Copying at Ferrara : New Documents, Essays on Music and Culture in Honor of Herbert Kellman, Paris ; Tours, p. 155‑160.

[Lowinsky 1957]

Lowinsky, E. E., 1957, The Medici Codex. A Document of Music, Art and Politics in the Renaissance, Annales musicologiques, 367, p. 61‑178.

[Merkley & Merkley 1999]

Merkley, P. A. et Merkley, L. L. M., 1999, Music and patronage in the Sforza Court, Turnhout http://www.sudoc.fr/055225020 (consulté le 22 janvier 2013).

[Motta 1887]

Motta, E., 1887, Musici alla corte degli Sforza: ricerche e documenti milanesi, Archivio storico lombardo, 14, p. 29‑64, 278‑340, 514‑561 http://www.sudoc.fr/060700262 (consulté le 22 janvier 2013).

[Pastor 1909]

Pastor, L., 1909, Histoire des papes, depuis la fin du Moyen âge : Ouvrage écrit d’après un grand nombre de documents inédits, extraits des archives secrètes du Vatican et autres, Paris.

[Picker 1965]

Picker, M., 1965, The Chanson Albums of Marguerite of Austria.

[Populus 1939]

Populus, B., 1939, L’ancienne maîtrise de Langres. Notes et documents sur la musique à la cathédrale, des origines à la Révolution et pendant la première partie du XIXe s., Langres https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k33529131.

[S4XIMWEL] An error occurred while retrieving the resource. (pp. 1110-1111)

[Sherr 1983]

Sherr, R., 1983, Notes on Some Papal Documents in Paris, Studi musicali, 12, p. 5‑16.

[Wexler 2014]

Wexler, R. M., 2014, Antoine Bruhier: Life and Works of a Renaissance Papal Composer, Turnhout http://www.brepols.net/Pages/ShowProduct.aspx?prod_id=IS-9782503553290-1.

Archival references

[F-AD 52]

S. d., Archives départementales de la Haute-Marne, FranceArchives https://francearchives.gouv.fr/fr/service/33857 (consulté le 9 février 2025).

[I-ASMo]

S. d., Archivio di Stato, Modena (I-MOs) https://rism.online/institutions/30001840 (consulté le 7 septembre 2025).

[V-CVaav]

S. d., Archivio Apostolico Vaticano, Città del Vaticano (V-CVaav) https://rism.online/institutions/30077317 (consulté le 5 avril 2025).

Contributors

Camilla Cavicchi - Project manager ; Biography author

David Fiala - Project manager ; Biography author


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Cavicchi Camilla, Fiala David, Antoine Bruhier, in RicercarDataLab [https://ricercardatalab.cesr.univ-tours.fr/people/112/] (accessed 27 November 2025).

Last modification: Oct. 10, 2025